09/11/2020 - 15h30.
Sur les sommets du Massif-Central, les conditions sont souvent rudes, et extrêmes plusieurs fois par an, notamment l’hiver, concernant les vitesses de vent et le givrage, associé à des températures négatives. Le Sancy et la chaine des Puys, premiers reliefs de l’ouest de la France, sont fortement soumis au flux d’ouest océanique. L’association air humide + froid en raison de l’altitude + vent violent est à l’origine d’accumulations de givre souvent intenses. Givre qui peut également se déposer en très grande épaisseur par d’autres flux (N.O à N.E notamment).
La photo ci-dessus prise en novembre 2019 permet de se rendre compte de l’épaisseur du givre qui dépasse ici largement le mètre. Ce givre est capable de se transformer en glace vive lors d’un redoux de front chaud par exemple (bruines/pluies verglaçantes), ce qui alourdi encore davantage la masse en place. La vidéo ci-dessous est aussi une bonne piqure de rappel des conditions possibles :
Ces conditions marquent le paysage : au-delà du pastoralisme qui explique en partie l’absence d’arbres, le vent violent et les épaisseurs de givre, voire de neige pour les zones d’accumulation, compliquent fortement l’épanouissement de la végétation du type arborescente. On remarque alors très bien l’altitude limite où les arbres arrivent encore à pousser : ils sont malmenés, souvent avec un développement « en drapeau ».
Tout initié à ces conditions sur les sommets en a connaissance. Toutefois, il y a un point qui reste inconnu, c’est celui de la mesure de ces conditions afin de les qualifier et de les comparer dans le temps et selon les espaces.
Comme pour toute démarche météorologique ou climatologique, la mesure doit se faire à l’aide d’instruments qui permettent alors d’avoir des données réelles, non biaisées par du ressenti humain ou des mesures trop ponctuelles ou intermittentes (ex : mesure des vitesses de vent à la main).
Des stations météo complètes et fiables, on peut en trouver à +/- 1000 € (cout total avec l’installation). Installer une station météo de ce type, avec notamment un anémomètre à coupelle et la girouette associée sera synonyme de :
1) Perte de données : le système pris dans le givre et/ou la glace ne pourra pas fonctionner
2) Casse rapide du matériel sous l’effet de la masse de givre et/ou de glace
Une anecdote rapportée par des collègues de l’OPGC (Observatoire de Physique du Globe de Clermont-Ferrand) : lorsqu’une équipe veut s’assurer que du matériel ne subira pas de dommages pour une installation prévue en Arctique ou en Antarctique, le test se déroule alors au sommet du puy de Dôme pendant un hiver : s’il est concluant, alors il peut partir à de plus hautes latitudes. Les conditions sur les massifs auvergnats ne sont donc pas anodines… Au niveau du givre, il faut par ailleurs monter à de plus hautes altitudes dans les Alpes pour rencontrer de telles épaisseurs (+/ 3000 m).
Heureusement, il existe des systèmes de mesure pour conditions extrêmes (nettement plus onéreux), utilisés en montagne et au niveau des zones polaires. Il s’agit d’un anémomètre-girouette fonctionnant à ultrasons et surtout doté d’un système de chauffage pour contrer la formation de givre*.
Une station de ce type sera installée dans les prochaines semaines avec un co-financement station du Mont-Dore/Météovergne (50%/50%) au niveau de la liaison le Mont-Dore/Super-Besse à 1834 m d’altitude. Les données produites seront d’une grande richesse pour les deux financeurs et les usagers.
Voici une liste non-exhaustive de son intérêt :
+ Exploitation de la station du Mont-Dore :
Par extension, données également enrichissantes pour Super-Besse et Chastreix-Sancy.
- Avoir une vision en temps-réel et à distance des conditions, pour la prise de décision
- Apporter une information claire aux usagers sur le contexte en altitude
- Justifier grâce aux données affichées, la fermeture de la liaison auprès des clients.
+ Météovergne :
- Apporter de riches enseignements sur les conditions en cours sur les sommets
- Mettre en perspective ces relevés avec les conditions à plus basse altitude
- Améliorer les prévisions en calant les sorties des modélisations et les observations
- Mettre en place un suivi climatologique au fil des décennies
Les données seront mises à disposition en interne au sein de la station du Mont-Dore et sur l’application Météovergne. Elles seront alors utiles pour (liste non exhaustive) :
- Tout usager du massif (pratiquant de vol-libre, randonneur, skieur, grimpeur, agriculteur…)
- Le secours en montagne et notamment lors de la mobilisation d’un hélicoptère (Dragon 63, PGM Mont-Dore).
Il convient de rappeler que toutes les applications automatisées vous proposant les conditions en cours actuellement au puy de Sancy ne sont que des retranscriptions des modélisations, autrement dit cela indique le temps qu’il DEVRAIT faire : les données ne sont ainsi pas issues d’observations de stations météo.
Un exemple d’installation de ce matériel en Norvège. Remarquez que l’épaisseur de givre est moindre que sur la photo précédente prise dans le Sancy. Photo : LUFFT dans MTI - 2017.
Cette installation sera unique à l‘échelle du Massif-Central : il s’agira très vraisemblablement de la plus haute station météo. Les récentes tempêtes des dernières années (sans être exceptionnelles) ont démontré, après mesures manuelles notamment, que le vent dépasse aisément les 200/250 km/h en rafales sur les sommets. La station risque de créer des « surprises » concernant les valeurs qui seront mesurées. Le seuil des 300 km/h aurait déjà été dépassé au sommet du Mont-Aigoual dans les Cévennes. Cette nouvelle station du Sancy peut mesurer jusqu’à 90 m/s (324 km/h). Ce n’est sans doute pas de trop…
La station Météo-France la plus élevée dans le massif, mesurant le vent, se situe à Chastreix-Sancy (1385 m). Voilà pourquoi cette nouvelle station va explorer un monde inconnu…
Météovergne, c’est une microentreprise gérée par un seul prévisionniste. Malgré la crise sanitaire persistante et les pertes de chiffre d’affaires associé (annulation des prestations pédagogiques, évènements demandeurs de prévisions annulés), les investissements matériels et humains se poursuivent par conviction. Cette nouvelle station est onéreuse mais répondra à un grand nombre de besoins, toutes activités confondues. Pour bénéficier de ces futures données, profiter et soutenir l’existant en attendant, abonnez-vous à l’application : c’est seulement 15 € par an. Merci d’avance à vous !
Le matériel est reçu. On espère une installation lors de la deuxième quinzaine de novembre. En attendant, une nouveauté est prévue mi-novembre sur l’application 😉.
Remarque : la station Sancy (température/humidité) est H.S depuis plusieurs semaines. Elle a été désinstallée. La future station la remplacera.
* L’ultrason, est transporté par le mouvement du fluide qu’il traverse. Des transducteurs électroacoustiques communiquent deux à deux par signaux ultrasons suivant deux axes orthogonaux. Cela permet de déterminer les différences des temps de transit (des ondes), induites par le flux d’air. Les mesures sont composées dans un calculateur intégré qui établit le module (la force) du vent et sa direction par rapport à un axe de référence.
コメント